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2026 et le cannabis médical : virage historique ou frein brutal ?
2026 devait être l’année de la maturité pour le cannabis médical. Un moment charnière, presque logique, après plus d’une décennie d’expérimentations, de promesses politiques et de marchés en surchauffe.
Mais à l’approche de cette nouvelle année, au lieu d’un alignement mondial, le secteur donne surtout l’image d’un puzzle mal assemblé. Chaque pays avance à son rythme, avec ses peurs, ses intérêts économiques et ses lignes rouges sanitaires. Résultat : une industrie mondiale sous tension, coincée entre reconnaissance thérapeutique et retour de bâton réglementaire.
Entre la prudence administrative et un horizon flou pour la France…
La France continue d’avancer lentement, très lentement. Depuis mars 2021, un programme expérimental encadré par l’ANSM permet à environ 3 000 patients d’accéder au cannabis thérapeutique dans des indications précises. Ce dispositif, prolongé jusqu’au 31 mars 2026, n’accueille plus aucun nouveau patient depuis mars 2024. Autrement dit, le pays teste… sans élargir.
En mars 2025, Paris a toutefois notifié à la Commission européenne un projet de cadre réglementaire pour la prescription et la distribution du cannabis médical. Une étape administrative réelle, mais sans texte définitif adopté à ce stade. La ligne choisie est claire : une approche strictement pharmaceutique, excluant totalement les fleurs de CBD au profit d’huiles, gélules ou sprays standardisés.
Une stratégie qui rassure les autorités, mais qui pourrait limiter l’adhésion de certains professionnels de santé et patients…
Une avancée symbolique du côté des Etats-Unis, mais des blocages persistants
Outre-Atlantique, 2026 marque une reclassification attendue depuis longtemps. En effet, le cannabis devrait quitter la catégorie des substances sans valeur médicale reconnue pour passer en Schedule III. Le signal est fort, mais la portée reste limitée, car le cannabis reste illégal au niveau fédéral, sans réforme bancaire ni commerce inter-États autorisé.
Le principal effet concret concerne la fiscalité. La fin de l’article 280E permet aux entreprises du secteur de déduire leurs charges, améliorant mécaniquement leur viabilité économique. En parallèle, la crainte monte de voir le cannabis médical basculer vers un modèle dominé par l’industrie pharmaceutique, avec des médicaments standardisés, loin des dispensaires historiques.
La téléconsultation dans le viseur de la régulation ?
En Allemagne et en Australie, l’accès au cannabis médical s’est largement développé grâce aux plateformes de téléconsultation. Ce modèle a fait exploser le nombre de prescriptions, mais il suscite désormais une méfiance croissante des autorités sanitaires.
En Allemagne, un projet de loi vise à limiter sévèrement la prescription à distance, accusée de favoriser des usages détournés. De leur côté, les pouvoirs publics australiens s’inquiètent du manque de suivi médical et de pratiques commerciales agressives.
Et le risque est clair, car restreindre l’accès pourrait pénaliser en priorité les patients isolés ou en zones rurales…
Un marché mondial encore sous pression…
À l’échelle internationale, deux stratégies opposées créent un même déséquilibre.
Le Canada, premier exportateur mondial, produit largement au-delà de ses besoins domestiques. Cette surproduction alimente une chute des prix et fragilise les petits producteurs.
La Thaïlande, de son côté, s’impose comme un acteur low-cost agressif, porté par des coûts de production faibles et un soutien politique instable. Cette montée en puissance rapide attire les investisseurs, mais fait planer un doute sur la durabilité du modèle.
En 2026, le cannabis médical est partout… mais jamais de la même façon. Entre les expérimentations prolongées, les cadres partiels, et les restrictions soudaines, la cacophonie réglementaire domine.
Mais qu’il s’agisse de logique de santé publique, d’intérêts économiques ou d’un simple contrôle politique, le secteur peine à trouver une trajectoire stable. Et pendant que les États hésitent, les patients, eux, continuent d’attendre un accès clair, cohérent et durable à une thérapie qui n’a jamais été aussi discutée…